Pourquoi retourner dans cette horreur lorsque on a eu la chance d’en sortir ? Que faire quand on est né d’un père Hutu et d’une mère Tutsi se demande un étudiant rwandais en 2008 dans son mémoire d’anthropologie, ajoutant : « en avril1994 j’avais accepté de mourir sans m’interroger sur le pourquoi ? J’avais intériorisé le fait qu’en cas de trouble, le Tutsi en paieraient les conséquences et le plus souvent au prix de leurs vies. Je n’étais pas Tutsi si on se réfère à la constitution rwandaise de l’époque, mais avec la montée des extrémismes Hutu, les personnes issues de mariages mixtes ne devaient pas être épargnés. »
Il veut essayer de comprendre, pour lui au moins et à travers l’utilisation des sciences sociales, l’ampleur de l’horreur atteint durant ces cent jours de génocide à éclipse (du 7 avril au début juillet 1994) pourquoi des milliers de personnes se sont lancées sans réticence dans ces massacres qui ont fait environ un million de morts essentiellement du côté Tutsi, mais aussi chez les Hutu dits « modérés ». Le génocide rwandais n’a en effet pas été seulement le fait d’une classe politique restreinte ou de militaires mais d’une majorité de gens ordinaires et de responsables de la société civile ; il a été si subit et si enflammé qu’une « ivresse » a gagné une partie de la population. La mort était partout possible si l’on était autre chose que « Rwandais du Rwanda » (entendez Hutu) .Progressivement la vie sociale et politique ne s’est axée que sur l’ethnie, une construction sociale alors assez typiquement rwandaise née et développée dans les années 1990 et conduite par des idéologues du génocide des Tutsi. Une « communauté de la peur » avec d’un côté les Hutu représentant le Bien, de l’autre les Tutsi le mal ; les extrémistes Hutu affirmant que les deux groupes étaient facilement identifiables, puisqu’on ne pouvait échapper à son ethnie. Les miliciens Hutu nourri des «Dix commandement bahutu » veillent à ériger et conserver ce mur entre les deux ethnies, au point que les personnes jugées peu concernées par « l’union de tous les Hutu » étaient considérés comme « mauvais Hutu » et donc complices des Tutsi. On accusait aussi certains d’avoir « changé d’ethnie » soit par un mariage mixte, soit par la falsification de papiers d’identité ; la seule apparence physique pouvait décider aussi de sa survie ou de sa mort, les belles Tutsi étaient montrées du doigt , c’étaient des ennemies de l’intérieur et l’enfant qu’elles portaient ou déjà né un futur ennemi à abattre aussi. Un certain nombre de personnes affirment avoir payé pour être tuées par balle afin d’échapper à une mort lente et douloureuse. Notons comme le faisait remarquer Jean Hatzfeld dans « Une saison de machettes » (Seuil 2003) à propos de ce génocide que tuer ou massacrer n’était pas utilisé mais qu’ils parlaient de « travailler » et que pour les bébés massacrés il s’agissait d’ « arracher les racines »...
Toutes les variables sociales comme la classe, le niveau d’éducation ou le milieu professionnel ont été dépassé par la seule logique ethnique : l’opposition Hutu/Tutsi. La question ethnique était devenue la seule variable essentielle du pays. En 1994, la politique avait envahi toutes les sphères de la société ou n’existait plus que la question ethnique. Quiconque s’écartait de cette seule logique était taxé de traître et donc ennemi du « peuple majoritaire », c'est-à-dire des Hutu, et pouvait perdre la vie. C’était la logique du « si tu n’es pas avec nous, tu es contre nous ». Toute position neutre ou divergente de la seule question de l’opposition radicale Hutu/Tutsi était assimilée à une diversion mise en place par les Tutsi
Nulle par ailleurs qu’au Rwanda autant de civils ont pris part à de telles opérations génocidaires. Ces dernières n’étaient pas l’apanage des soldats ni de milices spécialement entraînées mais commises par des gens animés d’une vague conviction transformée en idéologie relative mais mortelle plus encore que morbide : il faut tuer l’autre ! Et c’est ce que beaucoup firent. Ajoutons que tuer son voisin en 1994 au Rwanda revenait aussi, accessoirement, à lui prendre en partie ou en totalité ses biens, ce qui n’était pas négligeable dans le contexte économique d’alors.
Il veut essayer de comprendre, pour lui au moins et à travers l’utilisation des sciences sociales, l’ampleur de l’horreur atteint durant ces cent jours de génocide à éclipse (du 7 avril au début juillet 1994) pourquoi des milliers de personnes se sont lancées sans réticence dans ces massacres qui ont fait environ un million de morts essentiellement du côté Tutsi, mais aussi chez les Hutu dits « modérés ». Le génocide rwandais n’a en effet pas été seulement le fait d’une classe politique restreinte ou de militaires mais d’une majorité de gens ordinaires et de responsables de la société civile ; il a été si subit et si enflammé qu’une « ivresse » a gagné une partie de la population. La mort était partout possible si l’on était autre chose que « Rwandais du Rwanda » (entendez Hutu) .Progressivement la vie sociale et politique ne s’est axée que sur l’ethnie, une construction sociale alors assez typiquement rwandaise née et développée dans les années 1990 et conduite par des idéologues du génocide des Tutsi. Une « communauté de la peur » avec d’un côté les Hutu représentant le Bien, de l’autre les Tutsi le mal ; les extrémistes Hutu affirmant que les deux groupes étaient facilement identifiables, puisqu’on ne pouvait échapper à son ethnie. Les miliciens Hutu nourri des «Dix commandement bahutu » veillent à ériger et conserver ce mur entre les deux ethnies, au point que les personnes jugées peu concernées par « l’union de tous les Hutu » étaient considérés comme « mauvais Hutu » et donc complices des Tutsi. On accusait aussi certains d’avoir « changé d’ethnie » soit par un mariage mixte, soit par la falsification de papiers d’identité ; la seule apparence physique pouvait décider aussi de sa survie ou de sa mort, les belles Tutsi étaient montrées du doigt , c’étaient des ennemies de l’intérieur et l’enfant qu’elles portaient ou déjà né un futur ennemi à abattre aussi. Un certain nombre de personnes affirment avoir payé pour être tuées par balle afin d’échapper à une mort lente et douloureuse. Notons comme le faisait remarquer Jean Hatzfeld dans « Une saison de machettes » (Seuil 2003) à propos de ce génocide que tuer ou massacrer n’était pas utilisé mais qu’ils parlaient de « travailler » et que pour les bébés massacrés il s’agissait d’ « arracher les racines »...
Toutes les variables sociales comme la classe, le niveau d’éducation ou le milieu professionnel ont été dépassé par la seule logique ethnique : l’opposition Hutu/Tutsi. La question ethnique était devenue la seule variable essentielle du pays. En 1994, la politique avait envahi toutes les sphères de la société ou n’existait plus que la question ethnique. Quiconque s’écartait de cette seule logique était taxé de traître et donc ennemi du « peuple majoritaire », c'est-à-dire des Hutu, et pouvait perdre la vie. C’était la logique du « si tu n’es pas avec nous, tu es contre nous ». Toute position neutre ou divergente de la seule question de l’opposition radicale Hutu/Tutsi était assimilée à une diversion mise en place par les Tutsi
Nulle par ailleurs qu’au Rwanda autant de civils ont pris part à de telles opérations génocidaires. Ces dernières n’étaient pas l’apanage des soldats ni de milices spécialement entraînées mais commises par des gens animés d’une vague conviction transformée en idéologie relative mais mortelle plus encore que morbide : il faut tuer l’autre ! Et c’est ce que beaucoup firent. Ajoutons que tuer son voisin en 1994 au Rwanda revenait aussi, accessoirement, à lui prendre en partie ou en totalité ses biens, ce qui n’était pas négligeable dans le contexte économique d’alors.
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